&&000 FRANCE 7TH GRADE 1990S FR-7TH-1990S.TXT UTF-8 &&111 J'étais alors élève de quatrième au lycée de ==Nice et ma mère avait, à ti l'hôtel Négresco, une de ces « vitrines » de couloir où elle exposait les articles que les magasins de luxe lui concédaient; chaque écharpe, chaque ceinture ou chemisette vendue, lui rapportait dix pour cent de commission. Parfois, elle pratiquait une petite hausse illicite des prix et mettait la différence dans sa poche. Toute la journée, elle guettait les clients éventuels, fumant nerveusement d'innombrables gauloises, car notre pain quotidien dépendait alors entièrement de ce commerce incertain. Depuis treize ans déjà, seule, sans mari, sans amant, elle luttait ainsi io courageusement, afin de gagner, chaque mois, ce qu'il nous fallait pour vivre, pour payer le beurre, les souliers, le loyer, les vêtements, le bifteck de midi - ce bifteck qu'elle plaçait chaque jour devant moi dans l'assiette, un peu solennellement, comme le signe même de sa victoire sur l'adversité. Je revenais du lycée et m'attablais devant le plat. Ma mère, debout, me regardait manger avec cet air apaisé des chiennes qui allaitent leurs petits. Elle refusait d'y toucher elle-même et m'assurait qu'elle n'aimait que les légumes et que la viande et les graisses lui étaient strictement défendues. Un jour, quittant la table, j'allai à la cuisine boire un verre d'eau. Ma mère était assise sur un tabouret ; elle tenait sur ses genoux la poêle à frire où mon bifteck avait été cuit. Elle en essuyait soigneusement le fond graisseux avec des morceaux de pain qu'elle mangeait ensuite avidement et, malgré son geste rapide pour dissimuler la poêle sous la serviette, je sus soudain, dans un éclair, toute la vérité sur les motifs réels de son régime végétarien. Je demeurai là un moment, immobile, pétrifié, regardant avec horreur la poêle mal cachée sous la serviette et le sourire inquiet, coupable, de ma mère, puis j'éclatai en sanglots et m'enfuis. =RomainGary, La =Promessedel'aube, =Gallimard, =1960 space méthode méthode o Aller à l'essentiel Le prudhommel qui sauva son compère' de la noyade Un pêcheur était un jour allé en nier üvcé sou 'bateau pour tendre ses filets. En regardant les flots, il vit juste devant lui un homme sur le point de se noyer. Il était énergique et habile ; il bondit, prit un grappin et le lança Mais le grappin frappa le naufragé en plein visage et lui entra dans l'œil. Néanmoins le pêcheur ramena l'homme jusqu'au bateau et, sans plus attendre, laissant là ses filets, il revint au port. Il fit porter le blessé dans sa maison, le soigna et le servit jusqu'à ce qu'il fût rétabli. À quelque temps de là, le rescapé s'avisa qu'ayant perdu son oeil, il avait subi un grand dommage : « Ce vilain m'a crevé l'œil et il ne m'a pas io dédommagé. Je vais aller porter plainte contre lui pour l'ennuyer un peu. » Il alla donc se plaindre au maire du village et celui-ci les convoqua pour un jour prochain. Le jour dit, les deux parties vinrent au tribunal. Celui qui avait perdu un oeil parla le premier car c'était lui le plaignant. - Seigneurs, dit-il, je porte plainte contre cet homme qui, il y a quelques jours, me frappa méchamment avec un grappin : il m'a crevé l'oeil, me causant ainsi un très lourd dommage. Je veux qu'on me rende justice ; je ne demande pas plus et j e n'ai rien à dire d'autre. L' autre répliqua sur-le-champ - Seigneurs, c'est vrai que je lui ai crevé l'oeil et je ne peux pas le contester. Mais je veux vous expliquer comment cela s'est passé afin de savoir si j'ai eu tort. Cet homme était en péril de mort, abandonné aux flots et sur le point de se noyer. Je lui ai porté secours et, je ne le cache pas, je l'ai frappé avec mon grappin. Mais c'est pour son bien que j'ai fait cela car ainsi je lui ai sauvé la vie. Je n'ai rien d'autre à ajouter. Pour l'amour de Dieu, rendez-m'en justice. Les juges étaient fort perplexes pour rendre une sentence. Mais un bouffon4 qui assistait au procès leur dit L'homme a marché sur la Lune! juillet. C'est le =18 juillet à =14 h =32, heure française, que la capsule spatiale =Apollo =XI est partie de =CapKennedy, au sommet d'une fusée Saturne de de haut, pesant =100 tonnes et d'une puissance de =15 millions de chevaux. =Apollo =XI doit, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, amener des hommes sur la Lune. Le =19, =Apollo =XI s'est satellisée avec son équipage composé de =NeilArmstrong, =EdwinAldrin et =Michael =Collins autour de la =Lune. Après une vérification approfondie de toutes les installations techniques, la séparation du module d'exploration lunaire =LEM =Eagle s'est effectuée le juillet, emportant =Armstrong et =Aldrin io vers leur objectif, =Collins restant seul aux commandes =d'Apollo XI en orbite autour de la Lune. Après une manoeuvre parfaite, le =LEM touche la surface lunaire à =21 =17. Après un séjour de quelques heures dans le =LEM, la sortie se prépare. Le premier homme à poser le pied sur la Lune, =NeilArmstrong, accomplit ce geste historique le =21 juillet à h =56. =EdwinAldrin le suit quelques minutes plus tard. Les deux astronautes resteront vingt-deux heures sur la Lune, dont deux environ à l'extérieur du =LEM. Des images des opérations sont transmises en direct de la =Lune à la =Terre : on estime qu'un demi-milliard de téléspectateurs ont assisté de par le monde aux retransmissions, comme lors de l'envol =d'Apollo =XI. Le programme de travail des astronautes sur le sol de notre satellite comprenait la mise en place de certains dispositifs scientifiques, par exemple pour la mesure du vent solaire, ainsi qu'une série d'exercices de mouvements sur un sol où la gravité ne représente que % de celle qui règne sur Terre, rendant ainsi les mouvements des astronautes très aériens. La première conversation téléphonique entre la =Lune et la =Terre a lieu entre les astronautes et le président =RichardNixon. Le départ de la =Lune a lieu le soir du =21 juillet à =18 h =54 précises, avec l'allumage de la fusée de l'étage du =LEM servant au retour. Le module s'arrime à la capsule mère =Columbia à =2 h =35, les deux premiers hommes de la =Lune, =Armstrong et =Aldrin, rejoignant =Collins. Le lendemain, =Apollo =XI, après le largage de l'étage de retour du LEM, rallume ses moteurs et entame sa route vers la =Terre. Le =24 juillet à =17 h =51, la capsule touche le =Pacifique dans prévue : la première expédition humaine sur la =Lune s'achève. En souvenir du premier alunissage, les astronautes ont laissé sur le sol du satellite un drapeau nord-américain en nylon, ainsi qu'une plaque d'acier inaltérable sur laquelle de futurs « touristes lunaires » pourront lire : « C'est ici que des êtres humains de la planète =Terre posèrent pour la première fois le pied sur la Lune, en =1969 ap. =JCNous sommes venus en paix pour toute l'humanité.» Signé : =NeilArmstrong, astronaute, =MichaelCollins, astronaute, =EdwinEAldrin, astronaute, =RichardNixon, président des =États-Unis space méthode Lire une notice documentaire Carcassonne Juchée sur son promontoire rocheux, la vieille cité médiévale de =Carcassonne se voit de loin, la célèbre silhouette dé ses . railles, de puissantes tours aux toits pointus, faisant même oublier la ville moderne ou ville basse, construite au mile siècle, qui s'étend à ses pieds. Avec sa double enceinte concentrique, que séparent des lices, la capitale de l'Aude est un exemple exceptionnel de ville fortifiée médiévale. Long de 1287 mètres et jalonné de tours, le rempart intérieur, le plus haut, conserve à sa base des éléments de fortifications romains et wisigothiques, que surmontent les constructions et transformations des xIe, xile et xiiie siècles. Gardée par 19 tours, l'enceinte extérieure s'étend sur mètres. Elle a été édifiée sous =SaintLouis et =PhilippeleHardi. Donnant accès à la =Cité, la porte =Narbonnaise forme à elle seule un véritable château fort, encadré par deux fortes tours. Adossé au rempart, le château =Comtal date du x11e siècle mais a été 1s remanié ultérieurement. Ultime refuge des assiégés, il est entouré de fossés et protégé, du côté de la ville, par une énorme barbacane. L'intérieur abrite un musée archéologique. Toujours dans la cité, la basilique =Saint-Nazaire marie une nef romane avec un transept et un choeur gothiques. Ses vitraux (des =xüle et =xive siècles) sont d'une grande beauté. À proximité, la tour =Saint-Nazaire offre un vaste panorama (table d'orien- tation). La visite de Carcassonne se doit de comporter une promenade dans les lices et une flânerie dans les ruelles de la =Cité. Dans la ville basse, on pourra se rendre au =Pont-Vieux (très belle vue sur la Cité), à l'hôtel de =Murat (=xvine siècle), à la cathédrale =Saint-Michel et à l'église =Saint-Vincent (toutes deux de style gothique languedocien). Chaque année, en août, la ville revit à l'heure du Moyen Âge, lors des « Médiévales », et pour le =14 juillet la Cité sert de décor à un extraordinaire spectacle pyrotechnique. avec une de ces mines moustachues, patibulaires et renseignées que les vieux matous finissent par acquérir à force d'expériences riches et variées. Il me regarda attentivement, après quoi, sans hésiter, il se mit à me lécher la figure. Je n'avais aucune illusion sur les mobiles de cette soudaine affection. J'avais encore des parcelles de gâteau au pavot répandues sur mes joues et mon menton, collées par mes larmes. Ces caresses étaient strictement intéressées. Mais cela m'était égal. La sensation de cette langue râpeuse et chaude sur mon visage me fit sourire de délice - je fermai les yeux et me laissai faire - pas plus à ce moment-là que plus tard, au cours de mon existence, je n'ai cherché à savoir ce qu'il y avait, exactement, derrière les marques d'affection qu'on me prodiguait. Ce qui comptait, c'est qu'il y avait là un museau amical et une langue chaude et appliquée qui allait et venait sur ma figure avec toutes les apparences de la tendresse et de la compassion. Il ne m'en faut pas davantage pour être heureux. Lorsque le matou eut fini ses épanchements, je me sentis beaucoup mieux. Le monde offrait encore des possibilités et des amitiés qu'il n'était pas possible de négliger. Le chat se frottait à présent contre mon visage, en ronronnant. J'essayai d'imiter son ronron, et nous eûmes une pinte de bon temps, en ronronnant, tous les deux, à qui mieux mieux. Je ramassai les miettes du gâteau au fond de ma poche et les lui offris. Il se montra intéressé et s'appuya contre mon nez, la queue raide. Il me mordit l'oreille. Bref, la vie valait à nouveau la peine d'être vécue. Cinq minutes plus tard, je grimpais hors de mon édifice de bois et me dirigeais vers la maison, les mains dans les poches, en sifflotant, le chat sur mes talons. J'ai toujours pensé depuis qu'il vaut mieux avoir quelques miettes de gâteau sur soi, dans la vie, si on veut être aimé d'une manière vraiment désintéressée. =ZéphyrinXirdal nans le langage familier, on disait couramment : « =ZéphyrinXirdal ? Quel type ! » Tant au physique qu'au moral, =ZéphyrinXirdal était, en effet, un personnage peu ordinaire. Long corps dégingandé, chemise souvent sans col et toujours sans manchettes', pantalon en tire-bouchon, gilet auquel manquaient deux boutons sur trois, veston immense aux poches gonflées de mille objets divers, le tout fort sale et pris au hasard dans un amoncellement de costumes disparates, telle était l'anatomie générale de =ZéphyrinXirdal, et telle était la manière dont il comprenait l'élégance. De ses épaules, voûtées comme le plafond d'une cave, pendaient des bras kilométriques terminés par d'énormes mains velues - d'une prodigieuse adresse, d'ailleurs - que leur propriétaire ne mettait en contact avec le savon qu'à des intervalles indéterminés. Si la tête était, à la façon de tout le monde, le point culminant de son individu, c'est qu'il n'avait pu faire autrement. Mais cet original se rattrapait en offrant à l'admiration publique un visage dont la laideur atteignait au paradoxe'. Rien cependant de plus «prenant» que ces traits heurtés et contradictoires : menton lourd et carré, grande bouche aux lèvres épaisses, bien meublée de dents superbes, nez largement épaté, oreilles mal ourlées qui semblaient fuir avec horreur le contact du crâne, tout cela n'évoquait que très indirectement le souvenir du bel =Antinoüs. Par contre, le front, grandiosement modelé, d'une noblesse de lignes admirable, couronnait ce visage étrange, comme un temple couronne une colline, temple à la taille des plus sublimes pensées. Enfin, pour achever de dérouter son monde, Zéphyrin Xirdal, au-dessous de ce vaste front, ouvrait à la lumière du jour deux gros yeux saillants qui exprimaient, selon l'heure et la minute, la plus merveilleuse intelligence ou la plus épaisse stupidité. La mort de ses parents l'ayant rendu, à dix-huit ans, maître de ses actions et riche d'une quinzaine de mille francs de rente, =Zéphyrin =Xirdal , libéré de tous soucis, s'installa dans deux pièces minuscules, au sixième étage, rue Cassette, à Paris. Il y demeurait encore à trente et un ans. Depuis qu'il y avait installé ses pénates, le local ne s'était pas agrandi, et pourtant prodigieuse était la quantité de choses qu'il y avait entassées. =Pêle-mêle, on y distinguait des machines et des piles électriques, des dyna- mos, des instruments d'optique, des cornues, et cent autres appareils disparates. Des pyramides de brochures, de livres, de papiers s'élevaient du plancher au plafond, s'amoncelant à la fois sur l'unique siège et sur la table, dont ils haussaient simultanément le niveau, si bien que notre original ne s'apercevait pas du changement, quand, assis sur l'un, il écrivait sur l'autre. Au surplus, lorsqu'il se trouvait par trop incommodé par les paperasses, il remédiait sans peine à cet inconvénient. D'un revers de main, il lançait quelques liasses à travers la pièce ; puis, l'âme en paix, il se mettait . Lettre à Luis de Santangel rHispaniolal est une merveille : les sierras et les montagnes, les plaines et les vallées, les terres si belles et grasses, bonnes pour planter et semer, pour l'élevage des troupeaux de toutes sortes, pour édifier des villes et des villages. On ne croira pas sans les avoir vus ce que sont ses ports de mer et ses fleuves nombreux, grands, aux bonnes eaux, et dont la plupart charrient de l'or. Pour ce qui est des arbres, des fruits et des plantes, il y a grande différence entre eux et ceux de la =Juana. Dans =l'Hispaniola, on trouve beaucoup d'épices, de grandes mines d'or et d'autres métaux. Les gens de cette île et de toutes lo les autres que j'ai découvertes ou dont j'ai eu connaissance vont tout nus, hommes et femmes, comme leurs mères les enfantent, quoique quelques femmes se couvrent un seul endroit du corps avec une feuille d'herbe ou un fichu de coton qu'à cet effet elles font. Ils n'ont ni fer, ni acier, ni armes, et ils ne sont point faits pour cela ; non qu'il 1 ne soient bien gaillards et de belle stature, mais parce qu'ils sont prodigieusement craintifs. Ils n'ont d'autres armes que les roseaux lorsqu'ils montent en graine, et au bout desquels ils fixent un bâton net aigu. Encore n'osent-ils pas en faire usage, car maintes fois il m'est arrivé d'envoyer à terre deux ou trois hommes vers quelque ville pour prendre langue, ces gens sortaient, innombrables mais, dès qu'ils voyaient s'approcher mes hommes, ils fuyaient au point que le père n'attende pas le fils. Et tout cela non qu'on eût fait mal à aucun, au contraire, en tout lieu où je suis allé et où j'ai pu prendre langue, je leur ai donné de tout ce que j'avais, soit du drap, soit beaucoup op d'autres choses, sans recevoir quoi que soit en échange, mais parce qu'ils étaient craintifs sans remède. Lorsqu'il était enfant, Henri Bosco vivait à la campagne, dans une grande solitude. Deux fois par semaine, passait un marchand ambulant. Dès que son équipage s'était arrêté au carrefour des « Gages », où se dresse un cyprès vieux de quatre cents ans, il tirait par trois fois un son de sa trompette, ou plutôt d'un bouquin, qui cornait comme un cri de bouc aux oreilles et qu'on devait entendre à une lieue de là. Appel impérieux, auquel répondait, peu après, la procession des ménagères. Qui du « Mas de Constance », qui des « Clapassades », et qui de « Grangeons », on voyait arriver, panier au bras, ces femmes qui hâtaient le pas, pour avoir les meilleurs morceaux, cependant que lui, le couteau en main, attendait d'un air important devant ses balances de cuivre, cette clientèle toujours bougonnante, mais fatalement fidèle à cet homme utile. Quant à moi, ce qui m'attirait vers son magasin ambulant, c'était son âne. Car, pour le tirer, ledit magasin, il avait un âne, un assez gros 1 âne, tout gris, portant sur le nez une tache blanche, et sur le dos lorsque ce dos était visible - une grande croix brune, signe qu'il était un âne d'Afrique, pur sang. Un bel âne en somme, un âne nourri, et d'une nature d'âne estimable, car jamais je ne vis âne plus paisible, plus sage, et d'une patience d'âne plus longue. Certes, son maître en ao avait conscience, et visiblement le montrait, par la façon dont il équipait cet indispensable moteur de son commerce. Car cet âne était habillé. C'est bien la seule fois que j'ai vu habiller un âne. Il portait en effet des pantalons. Quatre jambes de pantalons, et de pantalons d'homme, ajustés à ses pattes. Deux par devant, deux par derrière, retenus sur son dos par des longes de cuir. En hiver, on y ajoutait une couverture de laine, et les pantalons étaient de velours, de velours côtelé, s'entend. En été, le velours le cédait à la toile, une toile bleue, toujours propre. Ainsi, à la dure saison, il était à l'abri du froid et, en été, des mouches. Contre le soleil, un chapeau de paille, d'où, par deux trous, pointaient ses énormes oreilles. Et pour le distraire, pendant à son cou, un petit grelot. Tel cet âne. Je ne l'ai jamais oublié. Si bien que j'en ai dit quelque chose long- temps plus tard. Sa mémoire m'est chère. Mais =Kennedy ne l'écoutait pas ; il s'avançait, l'oeil flamboyant, la carabine armée, terrible dans son audace. Sous un palmier, un énorme lion à crinière noire se tenait dans une posture d'attaque. A peine eut-il aperçu le chasseur qu'il bondit ; mais il n'avait pas touché terre qu'une balle au coeur le foudroyait ; il tomba mort. « Hourra ! hourra ! » s'écria =Joe. =Kennedy se précipita vers le puits, glissa sur les marches humides, et s'étala devant une source fraîche, dans laquelle il trempa ses lèvres avidement ; Joe l'imita, et l'on n'entendit plus que ces clappements de langue des animaux qui se désaltèrent. « Prenons garde, monsieur Dick, dit Joe en respirant. N'abusons pas ! » Mais =Dick, sans répondre, buvait toujours. Il plongeait sa tête et ses mains dans cette eau bienfaisante ; il s'enivrait. « Et =MFergusson ? » dit =Joe. Ce seul mot rappela =Kennedy à lui-même ; il remplit une bouteille qu'il avait apportée, et s'élança sur les marches du puits. Mais quelle fut sa stupéfaction ! Un corps opaque, énorme, en fermait l'ouverture. =Joe, qui suivait =Dick, dut reculer avec lui. « Nous sommes enfermés ! - C'est impossible ! qu'est-ce que cela veut dire ? Dick n'acheva pas ; un rugissement terrible lui fit comprendre à quel nouvel ennemi il avait affaire. « Un autre lion ! s'écria =Joe. - Non pas, une lionne ! Ah! maudite bête, attends », dit le chasseur en rechargeant prestement sa carabine. Un instant après, il faisait feu, mais l'animal avait disparu. « En avant ! s'écria-t-il. - Non, monsieur =Dick, non, vous ne l'avez pas tuée du coup ; son corps eût roulé jusqu'ici ; elle est là prête à bondir sur le premier d'entr 4 nous qui paraîtra, et celui-là est perdu ! - Mais que faire ? Il faut sortir ! Et Samuel qui nous attend ! - Attirons l'animal ; prenez mon fusil, et passez-moi votre carabine. - Quel est ton projet ? - Vous allez voir. » Joe, retirant sa veste de toile, la disposa au bout de l'arme et la présenta comme appât au-dessus de l'ouverture. La bête furieuse se précipita dessus ; Kennedy l'attendait au passage, et d'une balle il lui fracassa l'épaule. La lionne rugissante roula sur l'escalier, renversant =Joe. Celui-ci croyait déjà sentir les énormes pattes de l'animal s'abattre sur lui, quand une seconde détonation retentit, et le docteur =Fergusson apparut à l'ouverture, son fusil à la main et fumant encore. Joe se releva prestement, franchit le corps de la bête, et passa à son maître la bouteille pleine d'eau. La porter aux lèvres, la vider à demi fut pour =Fergusson l'affaire d'un instant, et les trois voyageurs remercièrent du fond du cceur la =Providence' qui les avait si miraculeusement sauvés. Les renards, dont les fourrures épaisses dissimulaient la maigreur, se réunissaient, de soir en soir plus nombreux, au centre d'une clairière rocheuse et les jeunes qui, naguère, durant l'assemblée des adultes, Jouaient à se pincer les pattes et à se mordiller le cou, avaient perdu leur bel entrain. Immobiles, assis sur le derrière, la queue larperdu leur bel entrain. Immobiles, assis sur le derrière, la queue largement étalée, ils regardaient les vieux goupils et leurs compagnes dont les yeux inquiets et les museaux plus pointus encore que d'ordinaire disaient l'angoisse croissante. Les plus madrés' compères s'étaient aventurés vers le soir aux lisières des bois, scrutant l'horizon et humant le vent et nul n'avait découvert, dans les rafales de froidure qui fouettaient les muqueuses surexcitées de leurs narines, la direction de la charogne nourricière exposée peut-être quelque part au loin et vers laquelle la tribu pérégrinerait à travers le silence de la nuit. La ventrée hebdomadaire payait à peine les audacieux qui se hasardaient, sous les regards des fenêtres de l'homme, à aller arracher quelque quartier glacé à l'appât qu'il avait installé à leur intention. Les lièvres méfiants, les oreilles perpétuellement tendues, sursautaient dans leurs gîtes au moindre choc, au plus léger froissement. Messire =Tasson, le blaireau, au fond de son terrier, couché en rond, dormait son pesant sommeil hivernal ; les martres descendaient de leurs pins vers les arbres de la vallée, tandis que leurs cou- sines les fouines, installées dans les chaumes des toitures ou dans les gerbiers4 des granges paysannes, vivaient au jour le jour de menues rapines sanglantes souvent payées de leur vie. Une tribu sédendaire de corbeaux, quelques familles de pies, deux ou trois nitées de geais, plus attachés que les autres à leurs forêts natales, erraient de bosquet en bosquet, de canton en canton, se posant sur les branches nues pour pousser d'heure en heure un cri de détresse auquel tous et toutes répondaient invariablement. Il semblait que les bêtes sauvages, les oiseaux comme les autres, n'ayant plus rien à attendre de la terre, et à bout de force et de courage, n'eussent plus eu qu'à se laisser périr et que les temps étaient venus. Pourtant, il n'en était rien et chaque soir, aux lisières sombres des bois, à l'ouverture des tranchées surélargies, aux brèches de mur des enclos et dans l'ombre des haies, on pouvait voir des soli- taires à longues oreilles ou à queue traînante tendre vers le village un museau inquiet, gratter de ci, fouiller de là, et se rapprocher insensiblement des maisons. La lune commençait à décliner quand ce régime de froidure et de faim avait commencé et, depuis, une nouvelle lune avait montré sa corne dans les brouillards du couchant et elle avait grandi peu à peu sans que rien se fût modifié dans ce terrible état de siège que la bise, la neige et la faim, les trois alliées sinistres, avaient proclamé sur les bois. L'heure s'assombrissait de plus en plus et l'homme lui-même, maté par le gel et par la tempête, subissait cette sorte de trêve du froid durant laquelle, abrité dans ses maisons, il dédaignait de guetter les minables sauvages qui rôdaient au large des villages. laquelle, abrité dans ses maisons, il dédaignait de guetter les minables sauvages qui rôdaient au large des villages. sauvages qui rôdaient au large des villages. Le =Rameaud'Or Le prince =SansPair, devenu berger, recherche la princesse =Brillante qu'il aime et qui est, maintenant, une bergère. Le Prince n'eut aucune rencontre sur sa route digne de l'arrê- ter; mais en arrivant dans le bois, proche du château du magicien et de sa sueur, il crut voir sa bergère ; il se hâta de la suivre : elle s'éloigna. « =Brillante, lui criait-il, =Brillante que j'adore, arrêtez un peu, daignez m'entendre. » Le fantôme fuyait encore plus fort ; et dans cet exercice, le reste du jour se passa. Lorsque la nuit fut venue, il vit beaucoup de lumière dans le château : il se flatta que sa bergère pouvait y être. Il y court ; il entre sans aucun empêchement. Il monte, et trouve dans un salon magnifique une grande et vieille fée d'une horrible =mai yeux ressemblaient à deux lampes éteintes ; on voyait le jour au travers de ses joues. Ses bras étaient comme des lattes, ses doigts comme des fuseaux, une peau de chagrin noir' couvrait son squelette ; avec cela elle avait du rouge, des mouches, des rubans verts et couleur de rose, un manteau de brocart d'argent, une couronne de diamants sur la tête, et des pierreries partout. « Enfin, prince, lui dit-elle, vous arrivez dans un lieu où je vous souhaite depuis longtemps. Ne songez plus à votre petite bergère ; une passion si disproportionnée doit vous faire rougir. Je suis la reine des =Météores ; je vous veux du bien et je puis vous en faire d'infinis si vous m'aimez. - Vous aimer, s'écria le prince, en la regardant d'un air indigné, vous aimer, madame ! Hé ! suis-je maître de mon couur ! Non, je ne saurais consentir à une infidélité ; et je sens même que si je changeais l'objet de mes amours, ce n'est pas vous qui le deviendriez. Choisissez dans vos Météores quelque influence qui vous accommode ; aimez l'air, aimez les vents, et laissez les mortels en paix. » La fée était fière et colère ; en deux coups de baguette elle remplit la galerie de monstres affreux, contre lesquels il fallut que le jeune prince exerçât son adresse et sa valeur. Les uns paraissaient avec plusieurs têtes et plusieurs bras, les autres avaient la figure d'un centaure ou d'une sirène, plusieurs lions à la face humaine, des sphinx et des dragons volants. Sans-Pair n'auait que seule liùulette un petit épieu dont il s'était armé en commençant son voyage. La grande fée cessait de temps en temps le chamaillis, et lui demandait s'il voulait l'aimer. Il disait toujours qu'il se vouait à l'amour fidèle, qu'il ne pouvait changer. Lassée de sa fermeté, elle fit paraître =Brillante « Hé bien, lui dit-elle, tu vois ta maîtresse au fond de cette galerie, songe à ce que tu vas faire ; si tu refuses de m'épouser, elle sera déchirée et mise en pièces à tes yeux par des tigres. Mogo l'insatisfait Mogo, le casseur de pierres, voulait être un daïmio, un seigneur Son génie protecteur, son mathi, l'aimait tendrement : il exauça son vceu. i veux être daïmio ? sois-le ! murmura joyeusement une voix à son oreille. Et, avant que Mogo stupéfait, ait eu le temps de comprendre ce qu'avait murmuré la douce voix, il se trouva daïmio, daïmio de première classe, avec un palais somptueux, une escorte nombreuse de cavaliers aux robes éclatantes, aux beaux chevaux luxueusement harnachés ; des habits de soie et d'or ruisselant de pierres précieuses ; des serviteurs empressés à deviner ses ordres pour les exécuter avant même qu'il eût achevé de les formuler. Ce qui surtout le flattait, c'était de voir la foule, les coolies', ses anciens camarades, les mendiants et les cheminots s'écarter respectueusement devant lui et son escorte en se courbant très bas pour saluer. Afin de jouir de ce spectacle enchanteur, =Mogo sortait tous les jours. Or, il arriva, un après-midi de la canicule, que =Mogo, parcourant la campagne avec ses cavaliers, dut s'apercevoir que, devant le soleil, un daïmio, si riche qu'il soit, ne compte pas plus que l'humble coolie travaillant sur les routes. Sous le parasol frangé d'or et sous la riche coiffure où brillait une grosse escarboucle, la sueur ruissela sur son front de seigneur autant qu'autrefois sur son front nu et découvert de casseur de pierres. Ce manquement aux égards qu'il croyait dus à son rang et à sa fortune courrouça d'abord =Mogo, puis le fit réfléchir. En réfléchissant, il s'avisa, ce à quoi il n'avait pas encore pensé, que les daïmios ne sont pas les premiers dans le monde ; qu'au-dessusi d'eux, il y a des princes, des rois, un mikado- auxquels ils doivent obéir et céder le pas et, devant cette découverte d'infériorité, toute la joie orgueilleuse de =Mogo s'en alla en fumée. Il pensa ensuite que le soleil est au-dessus des princes, des rois, du mikado, mais qu'au-dessus du soleil il n'y a personne ; que nul ne lui commande, ni au firmament où il règne comme roi des astres, les éclipsant tous par sa splendeur, ni sur la terre, que sa lumière et sa chaleur fécondent et qui, sans lui, resterait stérile. Alors, tout de suite, il commença à envier le soleil et bientôt souhaita ardemment d'être soleil. - Ah! mon mathi, soupira-t-il avec amertume, pourquoi, au lieu de me faire daïmio, ne m'as-tu pas fait soleil ! - Tu veux être soleil ? sois-le ! dit la voix toujours douce mais devenue grave et triste. Et =Mogo se trouva soleil ! REPÉRAGES Soudain, le vent tomba. Les =Achéens amenèrent les voiles et les rangèrent dans la cale. Puis, saisissant les avirons, ils firent avan- cer le vaisseau à la force de leurs bras. Ulysse découpa des morceaux dans un gâteau de cire et, tantôt les exposant au soleil, tantôt les pétrissant dans ses mains, il les amollit assez pour pouvoir en boucher les oreilles de ses compagnons. De leur côté, les =Achéens attachèrent Ulysse au mât avec des cordes, non sans lui avoir d'abord lié les pieds et les mains. Se tenant debout, =Ulysse pouvait voir loin et tout entendre. L'équipage, lui, n'entendait rien. Lorsque le navire fut à portée de voix du rivage, les Sirènes l'aperçurent et se mirent à chanter et à appeler « Viens, =Ulysse, gloire des =Achéens ! Laisse-toi ensorceler par nos voix ! Ne te raidis pas contre notre charme ! Viens, Ulysse, viens ! Tu t'en iras, après, comblé et plus instruit. Car non seulement nous savons tout sur toi et sur la guerre de =Troie, mais nous n'ignorons rien de ce qui se passe sur terre ! Penchés sur leurs avirons, les compagnons =d'Ulysse, dont les oreilles étaient bouchées par la cire, continuaient à ramer. Mais =Ulysse conçut le violent désir de se jeter dans les bras des Sirènes. « Amis, mettez le cap sur l'île, cria-t-il à l'adresse des Achéens, je vous ordonne de le faire ! » Mais l'équipage était devenu comme sourd et continuait à faire avancer le navire. « Les =Sirènes m'appellent ! hurla =Ulysse. Détachez-moi ou il vous en cuira ! » Ne percevant pas ses paroles, les =Achéens n'en firent rien. Bien au contraire : fidèles aux instructions que le roi =d'Ithaque leur avait données avant qu'il ne succombe au charme des =Sirènes, ils maintenaient la nef à bonne distance de l'île. « Je vous en conjure, compagnons, supplia =Ulysse, libérez-moi de mes liens. Il y va de mon bonheur ! Il y va de ma vie. ! » Mais, tout comme ils avaient ignoré ses menaces, les =Achéens ignorèrent ses supplications. Dans son désespoir, Ulysse fronça les sourcils et, par une mimique impérieuse, il leur ordonna de comprendre qu'ils devaient lui rendre la liberté. Sa colère impuissante n'eut qu'un seul effet : =Périmède et =Eurylochos quittèrent leurs bancs de nage et, s'approchant =d'Ulysse, serrèrent davantage ses liens. Peu à peu, le vaisseau s'écarta suffisamment de l'île, pour que l'appel des =Sirènes se perdît au loin. Lorsqu'ils furent sûrs de ne plus entendre leurs voix et leurs chants, les =Achéens retirèrent la cire de leurs oreilles et délivrèrent =Ulysse de ses liens. Son bon sens retrouvé, le roi d'Ithaque embrassa ses compagnons et les remercia de ne pas avoir cédé à sa folie. Le capitaine s'avança entre les tables et =Pedro put voir à quelques centimètres la boucle dure et brillante de son ceinturon. - Et vous, vous ne travaillez pas? - Si, m'sieu, dit =Leiva. Et, à toute vitesse, il fronça les sourcils, sortit sa langue entre ses dents et écrivit un grand « A » pour commencer sa rédaction. Quand le capitaine fut revenu au tableau et se fut installé pour parler tout bas avec la maîtresse, =Pedro jeta un coup d'oeil à la feuille de =Leiva. - Qu'est-ce que tu vas mettre? - N'importe quoi. Et toi? - Chais pas. Qu'est-ce qu'ils ont fait tes vieux hier au soir? - =Ben, toujours la même chose. Ils ont mangé, ils ont écouté la radio et ils se sont couchés. - Ma maman, pareil. - Ma maman, elle s'est mise à pleurer tout à coup. - Les femmes, ça pleure tout le temps, t'as pas remarqué? - Moi, j'essaie de jamais pleurer. Ça fait presque un an que j'ai pas pleuré. - Et si je te casse la gueule? - =Ben, pourquoi, puisqu'on est copains? - C'est vrai. Ils empoignèrent tous les deux leurs stylos et regardèrent l'ampoule éteinte, les ombres sur les murs, et ils se sentaient la tête vide comme une tirelire et sombre comme un tableau noir. =Pedro approcha sa bouche de l'oreille de =Leiva et lui dit - Dis, t'es antifasciste, toi? Leiva surveilla la position du capitaine. Il fit signe à Pedro de tourner la tête et vint lui souffler son haleine dans l'oreille - =Ben, évidemment, ducon. =Pedro s'écarta un peu de lui et cligna de l'oeil exactement comme font les cow-boys au ciné. Après quoi, il se rapprocha encore en faisant semblant d'écrire quelque chose sur la page déserte. - Mais t'es qu'un enfant, toi ! - Ça n'a rien à voir. - Ma maman, elle dit que les enfants. - Elles disent toujours ça. Mon papi on l'a arrêté et on l'a emmené dans le =Nord. - Le papa de =Daniel aussi. - Je connais pas. - L'épicier. =Pedro contempla la feuille blanche et lut, écrit de sa propre main : «=PedroMalbran. École =Siria - cours moyen A - Ma maison et ma famille. » - Eh! le Maigre ! dit-il à =Leiva. Chiche que je gagne la médaille ! - Vas-y, microbe ! Un passionné de football Pour son anniversaire, =Pedro a reçu un ballon. Il a protesté parce qu'il l'aurait voulu en cuir blanc avec des carrés noirs, comme ceux dans lesquels shootent les footballeurs professionnels. Celui-là, en plastique, et jaune par-dessus le marché, lui semblait beaucoup trop léger. Quand on veut marquer un but en faisant une tête, il s'envole. On dirait un oiseau tellement il pèse pas. - Tant mieux, lui dit son père. Comme ça, tu te feras pas mal à la tête. Et il lui fit de la main le geste de se taire parce qu'il voulait écouter la radio. Depuis le mois précédent, depuis que les rues de Santiago' s'étaient remplies de soldats, Pedro avait remarqué que son papa, tous les soirs, s'asseyait dans son fauteuil préféré, sortait l'antenn de la radio verte et écoutait avec attention des nouvelles qui arrivaient de très loin. Parfois, il venait des amis de son père qui fumaient comme des cheminées et, après, s'étendaient par terre et se collaient au haut-parleur comme s'il allait leur distribuer des bonbons par les trous. Pedro demanda à sa maman - Pourquoi ils écoutent toujours cette radio pleine de crachouillis? - Parce que ce qu'elle dit est intéressant. - Et qu'est-ce qu'elle dit? - Des choses sur nous, sur notre pays. -Quelles choses? - Des choses qui arrivent. - Et pourquoi on l'entend si mal? - Parce que la voix vient de très loin. Et =Pedro tout ensommeillé se mettait à sa fenêtre et tâchait de deviner entre quelles montagnes de la Cordillère que lui offrait sa fenêtre la voix de la radio pouvait bien se faufiler. En octobre, Pedro disputa de grands matchs de foot dans le quartier. Ils jouaient dans une rue pleine d'arbres, et courir à leur ombre au printemps était presque aussi agréable que de nager dans la rivière en été. =Pedro sentait que les feuilles bruissantes étaient comme l'immense verrière d'un stade couvert et qu'elles l'ovationnaient quand il recevait une passe précise de Daniel, le fils de l'épicier, ou s'infiltrait comme Simonsen entre les grands de la défense pour marquer un but. - But ! criait =Pedro. Et il courait embrasser tous ceux de son équipe, qui le portaient en triomphe comme s'il était un drapeau ou un cerf-volant. Bien que =Pedro eût déjà neuf ans, il était le plus petit du coin et c'est pour ça que tout le monde l'appelait « microbe ». Une vraie fête pour =Charles A Saumur, en =1819. L'avarice de =Grandet empoisonne l'existence de sa femme, de sa fille Eugénie et de la servante =Nanon. Un soir, arrive de Paris le cousin =CharlesGrandet. Jeune, beau, élégant, il éblouit la jeune fille de la maison. Les malheurs pressentis arrivent presque toujours. Là, =Nanon, madame =Grandet et =Eugénie, qui ne pensaient pas sans frisson au retour du vieux tonnelier, entendirent un coup de marteau' dont le retentissement leur était bien connu. - Voilà papa, dit =Eugénie. Elle ôta la soucoupe au sucre, en en laissant quelques morceaux sur la nappe. =Nanon emporta l'assiette aux eeufs. Madame =Grandet se dressa comme une biche effrayée. Ce fut une peur panique de laquelle =Charles s'étonna, sans pouvoir se l'expliquer. - Eh! bien, qu'avez-vous donc? leur demanda-t-il. - Mais voilà mon père, dit =Eugénie. -Eh! bien?.. Monsieur =Grandet entra, jeta son regard clair sur la table, sur Charles, il vit tout. - Ah ! ah ! vous avez fait fête à votre neveu, c'est bien, très bien, c'est fort bien! dit-il sans bégayer. Quand le chat court sur les toits, les souris dansent sur les planchers. - Fête? se dit =Charles, incapable de soupçonner le régime et les mceurs de cette maison. - Donne-moi mon verre, =Nanon ! dit le bonhomme. Eugénie apporta le verre. Grandet tira de son gousset un couteau de corne à grosse lame, coupa une tartine, prit un peu de beurre, l'étendit soigneusement, et se mit à manger debout. En ce moment, =Charles sucrait son café. Le père =Grandet aperçut les morceaux de sucre, examina sa femme qui pâlit, et fit trois pas; il se pencha vers l'oreille de la pauvre vieille, et lui dit - Où donc avez vous pris tout ce sucre? - =Nanon est allée en chercher chez =Fessard, il n'y en avait pas. Il est impossible de se figurer l'intérêt profond que cette scène muette offrait à ces trois femmes : =Nanon avait quitté sa cuisine et regardait dans la salle pour voir comment les choses s'y passeraient. =Charles ayant goûté son café le trouva trop amer, et chercha le sucre que =Grandet avait déjà serré4. - Que voulez-vous, mon neveu? lui dit le bonhomme. - Le sucre. - Mettez du lait, répondit le maître de la maison, votre café s'adoucira. - Tu as une lettre ! =Guillaume sursaute. Il a dû s'assoupir dans son fauteuil. Il ouvre un oeil, demande - Quelle heure est-il? - Dix heures 1 répond l'infirmière. Debout devant lui, elle lui sourit gentiment et elle lui semble très grande, comme d'habitude ! =Guillaume referme son eeil. Depuis son accident, il n'aime pas regarder des gens debout sur leurs deux jambes. - Dix heures du matin, je précise! ajoute l'infirmière avec un petit rire, avant de s'éloigner. =Guillaume entend les semelles de bois de ses chaussures claquer sur le parquet de la grande salle des pas perdus, encore vide pour l'instant. Car c'est l'heure des soins ou des examens pour la plupart des malades. Mais tout ça, c'est fini pour =Guillaume. Depuis qu'il a un fauteuil! Il rouvre un oeil, juste pour s'assurer que l'infirmière est partie. La porte bat encore. Elle a dû la pousser d'un geste brusque, comme d'habitude. Toujours pressée, murmure =Guillaume. Elle court. Il n'achève pas. Il sent les larmes monter. L'infirmière court toujours. Le chauffard court toujours, lui aussi. Seul, =Guillaume ne court plus ! Et personne, dans cet hôpital, pour lui dire s'il pourra courir de nouveau, un jour. Le chirurgien ne vient plus le voir qu'une fois par semaine. Cela fait longtemps qu'il a opéré =Guillaume. Et, depuis trois mois, il répète la même chose à la fin de chaque visite - Il faut attendre ! Puis il sort de la chambre, les mains dans les poches de sa blouse, en parlant avec les internes qui le suivent en cortège. Il paraît qu'il n'en dit pas plus aux parents de =Guillaume, ni aux infirmières ni à personne! « Docteur faut-attendre! », c'est ainsi que =Guillaume l'appelle maintenant. Et il attend en dormant dans son fauteuil roulant. Que faire d'autre? D'ailleurs, quand il dort, il rêve qu'il marche, qu'il saute, qu'il court. Comme si jamais aucune voiture n'avait renversé =Guillaume =Vevay, onze ans et demi, alors qu'il revenait de l'école toute proche en vélo, sur la petite route des =Pinchinats, près =d'Aix-en-Provence, le mardi octobre =1991, un peu après cinq heures. - Cinq heures du soir, je précise! murmure =Guillaume. Massacre à l'abbaye L'armée de =Picrochole envahit les terres du géant Grand-grousier, père de =Gargantua, et pénètre dans les vignes de l'abbaye de Seuillé. Ce disant, to =Imeuresl mit bas son grand habit et se saisit du bâton de la croix, taillé en coeur de cormier2, long comme une lance, rond à plein poing et semé de fleurs de lys. Ainsi vêtu en belle casaque, mit son froc en écharpe, et de son bâton donna si rudement sur les ennemis qui étaient en train de vendanger qu'ils en furent surpris à ne se point défendre. Porte-guidons et porte-enseignes avaient, en effet, mis guidons et enseignes le long des murs, les tambourineurs avaient défoncé leurs tambours pour les emplir de raisins, les trompettes avaient les bras chargés de grappes; personne n'était à sa place. Aussi l'arrivée fort mourir sur le coup. Les uns mouraient sans parler, les autres parlaient sans mourir; les uns mouraient en parlant, les autres parlaient en mourant. Ainsi =Jean des =Entommeures fit la grande prouesse de défaire et d'occire treize mille six cent vingt-deux ennemis à lui tout seul. Tous les secrets du pirate Oyez, oyez, Terriens ! Tous les secrets du pirate est une mine de renseignements authentiques où les apprentis pirates trou- veront d'indispensables conseils. Faites la connaissance de =LongBenAvery, de =Barbe-Noire, du capitaine =Kidd, de =Henry =Morgan et des femmes pirates =AnneBonny et =ChingShih. Découvrez le monde des pirates : l'élégance de certains d'entre eux, les simulacres' de procès, le supplice de la planche, la vérité sur les trésors enterrés, les châtiments qu'on réservait aux pirates capturés. vos boucles de chaussures, de préparer des biscuits pour les voyages au long cours, de fabriquer votre drapeau, de dessiner le plan de votre île au trésor, de frapper vos écus d'or, et de savoir si vous souffrez du scorbut. Un univers mystérieux et rebelle s'offre à vous! À la mode des pirates =BartholomewRoberts, qui ne buvait que du thé et donnait repos à ses musiciens le septième jour, était un homme grand, brun et de figure avenante : il portait une jaquette et une culotte de riche damas', un chapeau orné d'une plume rouge, une chaîne d'or à son cou, et une grande croix de diamant. Les deux pistolets dont il ne se séparait pas étaient assurés par un baudrier de soie. Plus curieux encore est le costume de l'horrible =EdwardTeach, dit =BlackBeard (début du =xviie siècle). Il portait une barbe somber qui lui montait jusqu'aux yeux et lui recouvrait même la poitrine. Et cette barbe était finement travaillée. Il l'organisait en petites tresses qu'il accrochait autour de ses oreilles mais c'est au combat que son dandysme s'exaspérait. Là, il se harnachait d'une écharpe qu'il passait sur ses épaules et qui contenait trois 1 paires de pistolets. A son chapeau, il fixait deux mèches allumées qui flottaient autour de son visage. On comprend que pour les témoins « on ne saurait se former l'idée d'une furie des enfers plus terrible que sa figure ». Un vieillard effrayant Or il advint que, pendant ce temps, les trois filles du roi étaient justement assises derrière un rideau de la salle de réception, et entendaient ces paroles. Aussi la plus jeune des trois soeurs se mit-elle à considérer avec attention le savant qui devait lui échoir comme époux, et voici ! C'était un vieux bien ancien, âgé d'au moins cent ans, si ce n'est davantage, avec un reste de cheveux blanchis par le temps, une tête branlante, les sourcils mangés de teigne', les oreilles tombantes et fendues, la barbe et les moustaches teintes et sans vie, des yeux rouges et louches se regardant de travers, des bajoues flasques, jaunes et criblées de creux, un nez comme une grosse aubergine noire, une figure ratatinée comme le tablier d'un savetier, les dents saillantes comme les dents d'un cochon sauvage, et des lèvres pendantes et pantelantes comme les paupières du chameau; en un mot ce vieux savant-là était quelque chose d'effrayant, une horreur composée de monstrueuses laideurs qui en faisaient l'être certainement le plus difforme de son temps et le plus épouvantable de son époque; car comment ne l'eût-il pas été avec ces divers attributs et, en plus, ses mâchoires vides de leurs molaires et armées, en guise de canines, de crocs qui le rendaient semblable aux éfrits qui épouvantent les petits enfants dans les maisons désertes, et font crier d'effroi les poules dans les poulaillers. Tout cela! Et justement la princesse, la plus jeune des trois filles du roi, était l'adolescente la plus belle et la plus gracieuse de son temps, plus élégante que la tendre gazelle, plus douce et plus suave que la brise la plus caressante, et plus brillante que la lune en son plein; elle était vraiment faite pour plaire ; elle se mouvait et le rameau flexible était confondu de ses balancements onduleux; elle marchait et le chevreuil léger était confondu de èches allu